Préparation et recrutement militaire An IX – 1920
(Source : archives Creuse, 2010).
Historique du service militaire
A la veille de la Révolution, la Monarchie disposait d’une armée de métier.
Conformément aux prescriptions de l’Edit de Ségur (22 mai 1781), les nobles fournissaient la majorité de l’encadrement du corps armé, monopolisant les hauts grades. La Révolution et les défaites de la République ont conduit à repenser le recrutement et la composition de l’armée. Les effectifs avaient fondu, passant de plus de 700 000 hommes à moins de 500 000 en 1795. Le Directoire mit donc au point un nouveau système avec la loi Jourdan du 19 fructidor an VI (5 septembre 1798). Cette loi établit la conscription astreignant au service obligatoire les jeunes gens âgés de vingt ans. Les modalités d’application - tirage au sort des mobilisés, possibilité d’acheter un remplaçant - sont établies en 1799.
 
Après les sanglantes campagnes impériales, l’aspiration à la paix devient générale.
Aucune menace ne pesait aux frontières et les préoccupations de l’époque se résumaient dans la célèbre expression de Guizot « enrichissez-vous ».
On fit donc voter la loi Gouvion-Saint-Cyr en mars 1818, qui prévoyait la formation d’une armée par engagements de volontaires et par incorporations d’une partie du contingent. Les jeunes gens âgés de vingt ans qui tiraient au sort « un mauvais numéro » (40 000 au total) devaient faire six ans de service militaire, sauf s’ils pouvaient payer un remplaçant.
Avec l’avènement de Louis-Philippe en 1830, 2 000 officiers démissionnèrent et les lenteurs de l’avancement sapèrent le moral des soldats.
 Le ministre de la guerre fit voter la loi Soult le 21 mars 1832. Certains principes ne furent pas modifiés : le service long, le tirage au sort et le remplacement. Toutefois la durée du service est ramenée à sept ans et le contingent levé est divisé en deux parties, la première immédiatement incorporée, la seconde laissée dans ses foyers ne peut être appelée sous les drapeaux que par ordonnance royale. Mais le système du remplacement, jugé injuste, fut remplacé par l’exonération : les mauvais numéros pouvaient payer une indemnité de 2 800 F alimentant une caisse de l’armée.
Ainsi, la Monarchie légua au 2°Empire une armée métropolitaine organisée et disciplinée : des institutions militaires souples, mais présentant de graves lacunes, notamment l’absence de réserves instruites. Par conséquent, dans la perspective d’une éventuelle épreuve de force, l’empereur entreprit une réforme militaire confiée au maréchal Niel. Son idée était de rompre avec la loi Gouvion-Saint-Cyr, qui exemptait la bourgeoisie par le remplacement, et de mettre en place, sur le modèle prussien, un service militaire obligatoire. Mais le projet s’enlisa face à l’hostilité des chefs de l’armée, attachés à un corps professionnel, des notables qui souhaitaient le remplacement et des républicains attachés aux idées pacifistes. Ainsi, la réforme maintenait le tirage au sort et le remplacement se limita à la formation d’une réserve, d’une Garde Nationale mobile pour la défense du territoire et augura mal d’une épreuve de force en Europe.
Après la défaite de 1870 face à l’armée prussienne, au-delà des clivages politiques, s’imposa à tous le devoir national de reconstituer rapidement une armée pour rassurer les français.
En trois années furent adoptées les lois fondamentales sur le recrutement, l’organisation de l’armée, les cadres et les effectifs.
 
La loi Cisey de juillet 1872 rétablit un service universel et obligatoire, sans possibilité de remplacement, pour une durée totale de vingt ans dont cinq ans dans l’armée active, quatre ans dans la réserve. N’étaient dispensés, en dehors des inaptes pour des raisons physiques ou mentales, que les soutiens de famille, les étudiants ecclésiastiques et les candidats à l’enseignement public. Le contingent annuel était divisé en deux parties déterminées par le tirage au sort, selon les chiffres fixés par le ministre. La première devait accomplir toute la durée du service, l’autre était renvoyée dans ses foyers au bout d’un an, et constituait la disponibilité. Dès lors, on mit en place les registres matricules par département, à partir des listes cantonales de recrutement établis par les maires pour les jeunes gens âgés de vingt ans, mentionnant l’incorporation et tous les changements (affectation, domicile…).
En 1889, la loi Freycinet instaura un service de 3 ans, personnel et obligatoire pour tous, mais qui restait inégal. Les dispensés devaient un service d’un an réduit à dix mois pour les bacheliers et étudiants ; et les exemptés du service actif ne devaient qu’un service auxiliaire.
Les marginaux étaient désormais incorporés dans les corps de discipline coloniaux, tandis que les condamnés pour crimes étaient envoyés dans les bataillons d’infanterie légère d’Afrique. La principale caractéristique de la loi votée le  7 août 1913 est de porter à trois ans la durée de service dans l’armée active, à onze ans celle dans la réserve de l’armée active et à sept ans celle dans la territoriale ainsi que la réserve.
 
Le recrutement :
La conscription était la base du système de guerre napoléonien : les maires, puis les préfets et sous-préfets choisissaient les conscrits. En 1802, le tirage au sort se substitue aux désignations et devient la règle en 1805.
Le régime de la loi du 10 mars 1818 institue les listes cantonales du tirage au sort donnant le numéro d’inscription sur la table de recensement pour l’ensemble des jeunes gens du canton et dans l’ordre des numéros échus lors du tirage au sort.
Le régime de la loi du 27 juillet 1872 crée les listes de recrutement cantonal, elles regroupent par canton et ordre de tirage au sort l’ensemble des jeunes gens d’une classe, à l’exception de ceux ayant fait l’objet d’une décision d’ajournement à l’année suivante. Cette loi a institué le principe du service militaire universel, tout en maintenant le tirage au sort pour déterminer la durée du service (un ou cinq ans).
 
La loi du 26 mars 1905 institue un service militaire égal pour tous et par conséquent supprime le tirage au sort. Les jeunes gens y figurent toujours par canton dans l’ordre chronologique de leur naissance, puis dans l’ordre alphabétique à partir de la classe 1911.
Ces tableaux donnent en plus des informations classiques déjà présentées sur les listes de tirage au sort, deux sortes d’informations nouvelles : d’une part, le signalement physique
de chaque homme avec, à partir de la classe 1908, la taille (renseignement qui ne figurait plus que sur le registre matricule depuis la suppression de la liste départementale du contingent en 1872), et certaines années, le poids ; d’autre part, les aptitudes de chacun dans les domaines variés tels que la conduite des chevaux, des voitures à cheval ou automobiles, des bicyclettes, ou la pratique de la musique…
Enfin, les registres matricules donnent le détail des services accomplis par chaque homme jusqu’à sa libération définitive des obligations militaires.
Ces registres ont un intérêt considérable car ils mentionnent les noms, prénoms, filiation et qualité du conscrit, des renseignements sur son physique ou d’ordre médical, ses campagnes militaires, ses blessures, ses décorations ou condamnations, ainsi que ses adresses successives lors de son passage en tant que réserviste.
Les états signalétiques et des services sont conservés aux Archives départementales du lieu de recensement. 

                                
 
Comment cela se traduit il pour les ancêtres males de nos familles ?
Les registres des Archives de la Drome et de l'Ardèche permettent de retrouver la trace d’appelés nés ou habitant dans ces départements depuis 1816 ! Mêmes succinctes, les informations sont intéressantes. Voilà ceux que nous avons retrouvés au Conseil de Révision quand ils avaient 20 ans ou dans des archives d’Etat-Civil :

  
         PIC Jean (fils Daniel et Louise Vallon) : légionnaire, décédé à l’hôpital militaire de Toulon en 1835 à 22 ans.
 
        TARDY Joseph-Cyrille, né en 1847. Registre 5R1/103, n° 62, des tirés au sort* du canton de Romans.  Né et habitant Triors. Cultivateur. Faible de constitution, pieds tendres. Degré d’instruction : 0. Bon pour le service. Cheveux et front découverts ; yeux, sourcils : chat ; bouche petite ; teint brun ; 1m77.
 
         BOSSAN Jean, né en 1853. Registre 5R1/115, n° 106, des tirés au sort du canton de Romans. Né à Saint Lattier, habitant à Parnans. A eu fracture du bras droit. Degré d’instruction : 12,5. Mesure 1m60. Bon pour le service. Versé dans la disponibilité car devenu fils ainé postérieurement à son incorporation au 34° de Ligne.
 
 
     FOREL Marie-François-Joseph, né en 1855. Registre de l’Ardèche de 1875 sous le n° 1855. Cheveux et sourcils blonds ; yeux châtains ; front haut ; nez aquilin ; bouche moyenne ; menton rond ; visage ovale. Bon pour le service auxiliaire, défaut de taille. Passé dans la réserve en 1883.


        AGERON Jean-Marie-Joseph, né en 1863. Registre 5R1/136, n° 145 des tirés au sort du canton de Romans. Frère au service. Cultivateur. Degré d’instruction : 3.   Ne sait pas monter à cheval, ne connait pas la musique. Bon pour le service. 1,74m.

   TARDY Cyrille-Eloi, né en 1886. Registre 5R7/350, n° 350 canton de Romans. Cheveux et sourcils châtains ; yeux roux ; front découvert ; nez long ; visage ovale ; 1,72m. Degré d’instruction : 3. Exempté pour cause de faiblesse générale. Un nouveau conseil de révision de décembre 1914 le déclare apte pour le service.
 
    BOSSAN Jules, né en 1887. Registre 5R7/613, n°613 canton de Romans. Cheveux et sourcils châtains ; yeux châtains ; front moyen ; nez et bouche moyenne ; menton rond ; visage ovale ; 1,58m. Degré d’instruction : 3. Bon pour le service.



                          
 
*TIRAGE AU SORT. La Conscription fut tempérée par l'institution du tirage au sort. N'effectuaient leur service militaire que 30 à 35% des conscrits célibataires ou veufs sans enfant, chaque canton ne devant fournir qu'un certain quota d'hommes. Si sur 100 conscrits d'un canton, 35 devaient être appelés, le Conseil de révision se voyait obligé de "monter" jusqu'au numéro 70 voire 80 pour trouver le contingent exigé, compte tenu du nombre des dispensés, soutiens de famille, ajournés ou réformés. Certains Conseils de récupération ne retinrent que 25% des ajournés et réformés. Par contre, les levées anticipées et l'augmentation des contingents à partir de 1808 suscitèrent beaucoup de mécontentement.
Les familles bourgeoises ou nobles pouvaient négocier une somme devant notaire pour payer un remplaçant qui effectuait son service à la place de leur fils : c'est le principe du remplacement militaire.
Réformés. L'exemption, ou réforme, se basait sur des critères physiques. La taille d'abord : il fallait mesurer plus de 1,54 mètre pour être pris. Suivaient les difformités des membres, fréquentes à cette époque, et encore la faiblesse de constitution et les problèmes de vue, les signes de déficience mentale. L'index droit coupé exemptait le conscrit du service car il était inapte au tir, ce qui incitait à des mutilations volontaires. S'ajoutait l'état de la denture qui devait permettre de déchirer les étuis de papier contenant la poudre à fusil, dosée au coup par coup.
 
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